A l’heure où Maison&Objet lance le mouvement Women&design et où Faye Toogood devient designer de l’année, nous avons demandé aux participantes de Maison&Objet In The City de décrypter le statut des femmes dans le monde du design.
En septembre dernier, Mélanie Leroy, directrice générale de Maison&Objet et de la SAFI, lançait « Women&design by Maison&Objet » le premier réseau international des femmes dans la décoration. Le but de ce forum est de donner plus de visibilité aux femmes designers et décoratrices, et d’affirmer leurs valeurs communes. En Janvier prochain, la britannique Faye Toogood sera proclamée Designer de l’Année 2025 à Maison&Objet. « Quand j’ai débuté, dit-elle, les femmes reconnues dans ce métier étaient très rares. C’était un milieu masculin et il l’est toujours. » Faye Toogood s’est toujours attachée à ne pas considérer la différence entre hommes et femmes pour avancer. Qu’en est-il chez les participantes à Maison&Objet In The City ? Toutes militent de la même façon pour ne faire aucune distinction. « Si l’on regarde les pièces phare de ces vingt dernières années, on ne peut pas déclarer à priori si elles ont été imaginées par un homme ou une femme, observe Marie-Bérangère Gosserez, dont les deux galeries défendent le design contemporain. Lors de Maison&Objet In The City, elle fera exposition commune avec Amélie Maison d’Art, afin de créer un dialogue entre ses collections de design et les artistes représentés par Amélie Du Chalard. « Dans l’art, on peut noter une différence dans les médiums choisis, les femmes étant très nombreuses dans l’art textile ou la céramique, remarque Amélie. Dans les thèmes abordés aussi, une femme peut traiter le corps, le sensible, la mémoire. Quoi qu’il en soit chaque artiste a une voix unique, sans stéréotypes de genre et les collectionneurs achètent avant tout une pièce. »
Il y a 35 ans, Marie Daâge lançait sa première collection d’art de la table en porcelaine peinte à la main. Le principe est un choix infini de combinaisons entre 120 formes de pièces et 68 couleurs. « Je n’ai pas rencontré de problème de légitimité, car je suis française, et les Français sont reconnus dans le secteur du luxe, dit-elle. Je sens tout de même un étonnement lorsque je porte ma légion d’honneur, décoration que j’ai reçue il y a quelques années au titre de l’export, car 95% de notre production est vendue à l’étranger. Dans l’imaginaire, cette distinction reste masculine. » Deux des filles de Marie, Axelle et Isaure, travaillent à ses côtés « car nous partageons la même sensibilité. » Une communauté d’émotions, c’est aussi ce qui réunit les sœurs Virginie et Karine Glustin, qui ont succédé à leurs parents à la tête de leur Galerie spécialisée dans le design de collection des XXᵉ et XXIᵉ siècles. Maison Glustin édite également son propre mobilier. « Si je ne regarde pas le design en fonction du genre, dit Karine, avec ma sœur nous sommes très sensibles au style de Gabriella Crespi ou de Claude Lalanne. Des fleurs, des feuilles, des oiseaux, des courbes, des animaux… Alors oui, nous assumons un certain goût féminin. Mais ce qui nous caractérise, c’est avant tout l’art du mélange. Des pièces architecturées contemporaines, avec un lustre vénitien ou un paravent chinois, nous sommes très libres. » Alors qu’importe le genre, pourvu qu’on ait le style.