Dans l’intérieur des décorateurs

A force de dessiner du mobilier sur-mesure pour les chantiers de leurs clients, les décorateurs d’intérieur ont créé leurs propres collections, comme un échantillon de la quintessence de leur style. S’ils ne montrent pas les résidences privées qu’ils habillent, les meubles, eux, sont reproductibles et surtout adaptables sur-mesure à d’autres aventures. Ainsi, peut-on commander à Thierry Lemaire le canapé ou le guéridon présent dans les salons de l’Elysée, ou la console vue sur les images d’un fabuleux chalet à Gstaad. On retrouve dans la Galerie Le Berre Vevaud les collections de mobilier fait-main vues dans les résidences privées qu’ils ont décorées. Contrairement aux éditeurs classiques, chaque pièce est ici réalisée de façon singulière, par un artisan, en faisant appel aux savoir-faire de différentes maisons de tradition. L’Atelier Tortil dispose d’un solide éventail de savoir-faire mis à disposition des architectes et décorateurs pour concevoir sur-mesure tapis, mobilier et luminaires. Par extension, Jean-Pierre Tortil possède également sa propre collection. Invisible Collection, le premier site internet dédié aux meubles et objets des stars de la décoration, a trouvé l’endroit le plus sensé pour exposer : au cœur de la réserve de boiseries et décors anciens de Féau, artisan de leur restauration, et de leur reproduction sur-mesure.  Galerie May, rue de Lille, Maylis et Charles Tassin construisent des décors avec leurs meubles, mais aussi des pièces de collection ou d’artistes émergeants. A quelques pas, toujours rue de Lille, Laura Gonzalez possède désormais sa propre galerie. India Mahdavi, rue Las cases et rue de Bellechasse, expose dans plusieurs show-rooms accessoires, mobilier et collaborations. Sarah Lavoine, elle, adapte son mobilier aux aménagements de bureaux, qui prennent des airs « comme à la maison ». 

Le mobilier des décorateurs repousse les limites du luxe et de la virtuosité. Ainsi, Chahan Minassian fait-il appel à des artistes sculpteurs et des céramistes pour concevoir des lampes, des tables, des revêtements muraux uniques. Reda Amalou, à la Secret Gallery, rue de Varenne, présente le cabinet Lothaire et paravent Sculpture, réalisés en collaboration avec le sculpteur et céramiste Yann Masseyeff. Des pièces d’exceptions aux matériaux précieux, habillés de sculptures, chacune uniques, réalisées en grès puis teintées au lavis. Patrick Gilles et Dorothée Boissier vont dévoiler lors de cette édition de Maison&Objet In The City la collection Reflections, fruit d’une collaboration avec la brodeuse Emmanuelle Vernoux. Hollywoodienne ! Un cabinet reçoit des portes gainées de textiles brodés de deux kilos de sequins. Un fauteuil ourlé d’un plissé en paillettes noires évoque la danseuse Cyd Charisse, star des comédies musicales américaines des années 50. Les plaids, les coussins, enluminés de baguettes et sequins ont demandé 70, 100 heures de travail, à la façon des robes de haute couture. Galerie Véro-Dodat, Pierre Gonalons présente quant à lui son fauteuil Rosebud, en version couture, brodé par les ateliers Vermont. Pinto s’est associé au Lit National, entreprise du patrimoine Vivant, pour concevoir son premier lit, dont les pieds invisibles semblent le faire flotter en apesanteur. L’humeur de toute la collection Constellation est aux astres et aux étoiles… Un rêve. 

La matière inspire les architectes, qui la portent en majesté. Ainsi, Charlotte Biltgen a-t-elle invité l’artisan-designer Alain Ellouz, à exposer dans son show-room ses oeuvres lumineuses en albâtre. Elle-même présente un nouveau fauteuil en rotin, et un luminaire en perles de bois.  On pourra retrouver ces deux signatures également à Maison&Objet, dans l’espace Signature du Hall 7 pour Charlotte Biltgen et dans l’exposition « Haute Facture - Haute fréquence » pour Alain Ellouz. Christophe Delcourt, lui, rend hommage au bois, sa matière de prédilection avec une nouvelle collection Wild is the Wind présentée dans le show-room Delcourt Collection de la rue de Babylone. Enfin Stephanie Coutas, continue d’explorer la marqueterie de chêne croisé sur plusieurs pièces, dont un buffet et une lampe. Le collectif de designers et scénographes Uchronia, lui, s’est emparé des soieries de la Manufacture Prelle, pour un exercice de style détonnant entre pop culture et grande tradition.