A la question, quel serait le projet le plus fou que vous souhaiteriez réaliser ? Lee Broom répond la mise en scène d’un Opéra ! S’assoir avec le designer anglais, de passage à Paris à l’occasion de sa participation à la « British Capsule » de Maison&Objet, c’est parler architecture, théâtre, cinéma et haute couture, mais surtout design et sa mise en scène au quotidien. Rencontre.
Après des études de théâtre et de mode au Central Saint Martins College of Art à Londres, Lee Broom fait ses premières armes chez la prêtresse de la mode Punk, la regrettée Vivienne Westwood.
En 2007, il crée sa marque de luminaires et de mobilier. Minimaliste, élégant, souvent scénographié, son design aime se jouer des classiques pour mieux les réinventer. Chacune de ses expositions est un « Show » digne d’un défilé pensé sur-mesure.
Lee Broom : Le besoin de se réinventer constamment d’une collection à une autre. Chaque objet, chaque collection que je crée expérimente une nouvelle facette d’un matériau, d’une silhouette.
Si j’édite une collection de luminaires une saison, je penserai une collection de mobilier la suivante.
En design le rythme des collections est totalement différent de celui de la mode mais j’en ai gardé ce goût immodéré pour le renouveau et l’art de la performance.
Lee Broom : Oui bien sûr ou même d’un Opéra ! En 2020, j’ai lancé la Chaise « Musico », présentée également à Maison&Objet lors de la dernière édition Janvier 23. Pour le lancement de ce produit, nous voulions organiser un évènement à Milan. Celui-ci a dû être annulé en raison de la pandémie.
Donc, j’ai pensé un film de lancement sur mesure en scénographiant tout un orchestre et ses musiciens jouant de leurs instruments sur les chaises en question. La silhouette de chaque chaise reprend celle d’un instrument de musique. Nous avons enregistré la vidéo dans le studio mythique Abbey Road des Beatles à Londres. Venant du théâtre, l’art de la performance est clé dans mon approche du design. Vivienne Westwood, ses défilés théâtraux et ses performances sont d’éternelles sources d’inspiration pour moi. Je veux bousculer, surprendre, émouvoir l’utilisateur à travers mes collections.
Lee Broom : L’architecture a toujours été une source d’inspiration, les univers de Frank Lloyd Wright, Mies van der Rohe, en particulier.
Donc, le concept de chacun de mes shows se nourrit du lieu où je l’organise.
Ainsi, l’adresse milanaise avait une tonalité ecclésiastique et religieuse mais cela restait une galerie, et j’ai voulu la rendre spirituelle.
Lee Broom : Oui, on peut dire cela, je suis aussi un grand cinéphile et raconter une histoire, jouer avec des références historiques me parle.
Le film « Holy Mountain » réalisé en 1973 par le cinéaste franco-chilien Alejandro Jodorowsky a été, par exemple, une réelle source d’inspiration.
Fellini et ses décors romains m’inspirent également. En particulier, les films « Casanova » et « Orlando » m’ont marqué.
Lee Broom : Quand je dessine mes produits, le choix des matériaux prévaut sur la couleur.
Si j’utilise la couleur, c’est en monochrome pour donner le ton à mes expositions, créer une atmosphère spécifique et les différencier. En me limitant à une couleur, cela permet au produit de rester l’acteur principal d’une scénographie.
Lee Broom : Pour un client américain, il est très important de voir, toucher et ressentir un produit.
C’est pour cela que j’ai créé mon showroom à New York dans un format appartement / Penthouse. Avec cet espace, je vais au bout de ma démarche. Je présente pour la première fois dans un intérieur privé et non dans le cadre d’une exposition temporaire mes produits. Le décor du Penthouse Lee Broom invite le client à se projeter avec mes créations chez lui. Le mobilier a été pensé pour l’espace. C’est une nouvelle histoire que le client potentiel s’approprie, dans lequel il se retrouve et se projette.
Lee Broom : Storyteller dans l’âme, Vivienne Westwood m’a une fois dit : « Do your own thing ! »
Cette phrase est devenu mon mantra.