Deux installations exceptionnelles seront à voir dans le cadre de Design sur Cours, véritables odes au génie humain.
Parfois, les designers font un pas de côté. Habitués à combiner forme et fonction, main dans la main avec les artisans, ils haussent le curseur de la poésie pour se diriger aux frontières de l’art. Ce sera le cas de deux installations spectaculaires visibles à Paris Design Week. Les Japonais de Invisi investiront la cour de l’Hôtel de Soubise, siège du Musée des Archives Nationales dans le Marais, avec leurs constructions en bois d’un genre inédit. A la fois œuvre d’art unique, pièce de design et instrument de musique, leur Xylophone Ko-Tone Spyral se présente sous la forme d’une spirale en lattes de bois, s’élevant en éventail jusqu’à hauteur d’homme. On place une balle de bois à son sommet et la voilà qui dévale les petites marches taillées avec le plus grand soin pour que le son de ses rebond joue Jesus, que ma joie demeure, une cantate de Jean-Sébatien Bach. La course ne prend que trente secondes pour enchanter son auditoire. Sans énergie, ni humaine, ni électrique, la musique se joue des seuls lois de la gravité. La pureté de la spirale de bois, patiemment assemblée, se veut une allégorie d’une vie rêvée, où l’homme vivrait en parfaite harmonie avec la nature. La société nippone Invisi est spécialisée dans la sonorisation des films, de la publicité. Elle a voulu cette fois sortir de sa sphère commerciale pour explorer d’autres dimensions. Dans la cour on pourra aussi expérimenter leurs nouveaux bancs sonores Echo Stratum, qui enregistrent l’activité des alentours pour les restituer sous forme de nuage sonore…
Musée des Archives Nationales, 60 rue des Francs Bourgeois 75003 Paris.
L’artisan verrier Emmanuel Barrois, de son côté, fait une étourdissante démonstration de la maîtrise de son art avec son installation Réflexions. Dans les jardins du Palais Royal, il élèvera un échafaudage fait de 6000 mètres de prismes transparents entremêlés sur 15 mètres de hauteur. Sa construction est visible à partir du 7 septembre pour être achevée le 14. Tout en verre, il pèse sept tonnes, et n’a d’autre ambition que de piéger la lumière pour un moment de beauté et de poésie. Emmanuel Barrois ne dit jamais non à la folie. Installé en Auvergne, dans un immense atelier, il manie à la fois les gestes les plus traditionnels et les techniques de pointe. Sa virtuosité l’a mené à collaborer avec les plus grandes signatures de l’architecture, Franck Gehry, Kengo Kuma, Norman Foster, Christian de Portzamparc, Olafur Eliasson. Le verre est pour lui une lumière solide. Son kaleidoscope, monumental et fragile est un hommage aux bâtisseurs, au dépassement de soi, un manifeste d’optimisme sur la capacité des hommes à produire de la beauté.